Ce projet artistique, coordonné par le professeur de français, a permis aux 29 élèves de 3e7 du collège Victor Hugo de découvrir et de pratiquer le travail de mise en voix d’un texte littéraire. La classe a bénéficié de l’expérimentation de l’enseignement de l’éloquence (« exploiter les ressources expressives et créatives de la parole »).
De septembre à novembre 2021, avec leurs professeurs de français, d’histoire, d’arts plastiques et d’éducation musicale, ainsi qu’avec le metteur en scène Christophe Vincent, de la compagnie Cinématique Théâtre, les élèves ont travaillé sur plusieurs extraits du roman polyphonique Cris (Les Ateliers d’Actes Sud, 2001) de l’auteur contemporain Laurent Gaudé. Dans cette œuvre qui se situe à mi-chemin entre le roman et le texte théâtral, le lecteur suit, grâce aux monologues intérieurs, le destin de plusieurs poilus de la Grande Guerre.
Au cours des nombreuses journées de travail – 40 heures d’intervention au total – les élèves se sont emparés de ce « matériau sonore ». L’ensemble de ces heures a été intégralement financé par la DRAC Bourgogne-Franche-Comté.
Quand rigueur rime avec plaisir
Les débuts sont difficiles : il faut rester concentré, respirer, projeter sa voix, articuler, être « présent » sur scène – eh ! oui, beaucoup d’élèves réaliseront qu’un travail de mise en voix est un travail physique, qui engage tout le corps et se révèle épuisant ! Il faut encore mettre du sens sur un texte qui reste parfois encore opaque pour ces adolescents qui ne sont guère plus jeunes que les hommes à qui ils prêtent leur voix…
Rapidement les progrès se font voir, au fil des séances, car tous ont à cœur de ne faire qu’un, pour transmettre la puissance des mots de Gaudé et faire revivre les personnages du roman. Certains découvriront par cette expérience artistique qu’efforts et rigueur peuvent rimer avec plaisir !
C’est au pupitre et au micro, en ayant expérimenté le difficile travail de la lecture décalée, que Tao, Roxanne, Noha, Jahan, Jisoo, Marguerite, Enzo, Océan, Lylia, Aéla, Lison, Maturin, Inès et tous leurs camarades de classe ont « incarné » les voix de Jules, Boris, Marius, Ripoll, Barboni, Rénier…
Restitutions scéniques et devoir de mémoire
Les restitutions de travail se sont déroulées en deux temps, sur la semaine du 11 novembre 2021.
Les élèves se sont tout d’abord produits au collège devant les autres classes de troisième. À cette occasion, ils se sont d’ailleurs intéressés aux nombreux noms d’anciens élèves et de personnels tombés au champ d’honneur qui figurent sur les plaques commémoratives de l’établissement.
C’est ensuite au petit Kursaal de Besançon, l’après-midi du jeudi 11 novembre 2021, que la classe a livré sa seconde représentation dans le cadre du 103e anniversaire des commémorations du 11-Novembre organisées par la Ville. Les élèves ont ainsi participé pleinement et activement au devoir de mémoire rendu aux soldats de la Grande Guerre.
Le public a pu découvrir découvre, intégrées au dispositif scénique, les productions plastiques réalisées autour du thème du cri. La chanson de Craonne, travaillée en cours d’éducation musicale, a rythmé les différents mouvements dramatiques. Comme on le sait, cette chanson a été écrite à partir de la mélodie d’un grand succès sentimental d’avant-guerre : Bonsoir Mamour. Et peu à peu des dizaines de versions successives d’un texte anonyme ont dit les douleurs, les souffrances, la colère des soldats de l’armée française dès le début de 1915, pendant les combats de la colline de Lorette.
Une aventure artistique, citoyenne et fédératrice
La semaine suivant ces restitutions, l’aventure artistique et citoyenne s’est poursuivie lors d’une journée à Verdun organisée par le professeur d’histoire. Les élèves ont découvert, très impressionnés, les différents lieux de mémoire : l’ossuaire de Douaumont et son cimetière militaire, le fort de Douaumont, le village détruit de Fleury-devant-Douaumont et le Mémorial de Verdun ouvert sous l’égide de Maurice Genevoix, en 1967.
Malgré un calendrier très serré et une rentrée intense, il s’est avéré en définitive très intéressant et enrichissant de mettre en place un projet d’une telle envergure en tout début d’année scolaire. Fédérer la classe autour d’un projet commun, valoriser l’investissement et les compétences des élèves, développer l’estime de soi, éduquer à la pratique artistique : les fruits de ce travail vont nourrir, espérons-le, chaque élève tout au long de son année, toute particulière, de troisième !
